Des initiatives multiples pour survivre
Nous l’avons dit, écrit à plusieurs reprises les libraires à l’étranger se trouvent dans des situations dramatiques. Confrontés d’abord à des difficultés structurelles (pas d’usages commerciaux unifiés, absence de politique du livre dans beaucoup de pays et de soutien à une filière livre, concurrence des plateformes multinationales de vente en ligne, collaboration irrégulière avec les institutions locales à l’étranger). Elles sont aujourd’hui confrontées à des enjeux conjoncturels (augmentation du cout du transport, dévaluation de la monnaie dans certains pays, lente reprise, absence de commandes notamment scolaires et d’aide locale au niveau de la protection sociale et du chômage pour ne citer que ceux-là). Cumulées, ces difficultés mettent les libraires dans des situations dramatiques.
Un isolement renforcé à tous les niveaux
Beaucoup, sous le coup de l’angoisse du lendemain ne communiquent que de manière parcimonieuse avec l’AILF sans savoir comment s’en sortir. Cela s’ajoute aussi parfois à des difficultés antérieures qui ont affecté les librairies comme les soulèvements sociaux de Hong Kong, Santiago, Beyrouth pour ne citer qu’eux. Dans certains pays, ce sont des catastrophes naturelles comme à Djibouti où des inondations ont été suivies d’autres épidémies telles chikungunya avant que le Covid ne touche ce pays de la Corne de l’Afrique.
Tous se sentent isolés, seuls, sans appuis locaux comme le souligne Maryline Noël de Santiago citant la libreria Francesa de Bogotá qui signale que des commandes scolaires, arrivées juste avant la fermeture des écoles, étaient à présent refusées par les établissements sans compensation, laissant la librairie avec une dette et un stock invendable. La librairie Mille feuilles aussi nous indiquait comme beaucoup d’autres libraires que les instituts français ne semblent pas mesurer l’impact de l’absence de commandes sur l’économie des libraires particulièrement en ces temps de crise.
Des alternatives ... illustrant leur courage et leur détermination
Dans ce contexte quasi apocalyptique pour tous et notamment pour les libraires, quelles sont les alternatives proposées par les libraires en plus des aides du CNL qui sont proposées dans le cadre d’un dispositif exceptionnel ?
... une plus grande visibilité via leur site de sélections, coups de cœur, et de belles sélections de titres comme la librairie les Insolites à Tanger ou Culture and Co à Dubai qui déploient sur leur facebook un arsenal de choix de livres. Certains participent à des émissions locales pour évoquer des ouvrages selon des thématiques définies comme le fait la libraire de Vice Versa à travers son Facebook
... un système de livraisons à domicile en pick up, vélos, coursier de Londres à Santiago en passant par Bangkok, Abidjan, Shanghai, Amsterdam, Agadir, etc ...
... une vente via des plateformes de vente en ligne pour proposer leurs ouvrages comme en Argentine où la librairie Las Mil y Una Hojas opère de plus en plus via la plateforme Mercadolibre, une grosse entreprise de type Ebay.
...des appels à la solidarité de leurs clients en créant des fonds de soutien comme le fait la librairie Stendhal https://www.libreriastendhal.com/je-soutiens-la-libreria-stendhal/ qui propose à ses lecteurs, outre un don, des bons d’achat en attendant la reprise
des bons d’achat via une plateforme de librairies indépendants comme c’est le cas en Belgique, bons à utiliser dès l’ouverture des librairies via leur site
des campagnes via les réseaux sociaux comme celle en Espagne avec #confienemteconomiqueintelligentetsolidaire et #yoesperoamilibrero, campagnes réunissant des témoignages de dessinateurs, illustrateurs, auteurs, scénaristes du monde entier revendiquant la figure du libraire, du magasin de quartier et invitant chacun à attendre la fin du confinement pour aller en librairie.
Des réouvertures qui ne régleront pas le problème d’absence de trésorerie
Aujourd’hui, certaines ré ouvrent leurs librairies progressivement comme en Algérie, aux Emirats arabes, en Autriche, au Mexique, avec les mesures sanitaires nécessaires mais il faudra du temps pour revenir à la normal et cela ne résout pas le problème majeur de couvrir les frais fixes en période de fermeture ou de faible activité et les besoins de trésorerie pour relancer l’activité et honorer les échéances éditeurs...qui même reportées sont à régler...
Pour mettre en avant ces initiatives et le témoignage des libraires francophones, nous avons créé une nouvelle rubrique Chroniques du Confinement que nous vous invitons à découvrir.